Seydi El Hadj Malick Sy : L’homme de Dieu, le bâtisseur de la Tijaniyya au Sénégal

Fils de Sidy Ousmane Sy et de Sokhna Fatoumata Wade Wele, né vers 1855 à Gaé (Gaaya en wolof) près de Dagana, au bord du fleuve Sénégal, Seydi El-Hadj Malick Sy est l’une des plus grandes figures de l’islam au Sénégal. Maître soufi, érudit, éducateur et poète, il a profondément marqué la spiritualité et l’organisation religieuse de la confrérie Tijaniyya en Afrique de l’Ouest.

Une jeunesse vouée au savoir

Dès son jeune âge, Seydi El-Hadj Malick Sy se distingue par son amour du savoir religieux. Il débuta sa formation religieuse à Gaé avec Thierno Malick Sow et Alpha Mayoro Welé, des parents de sa famille maternelle. Seydi El-Hadj Malick Sy ira poursuivre ses études coraniques au Djolof, vers Sagatta, avec son oncle Amadou Sy. Il étudie dans plusieurs daaras du Fouta, du Djolof et de la Mauritanie, approfondissant le Coran, les sciences islamiques et la spiritualité. C’est un homme d’équilibre, d’écoute et de patience. À Saint-Louis, Seydi El-Hadj Malick Sy rencontra sa première épouse Sokhna Rokhaya Ndiaye( la mère de serigne Babacar) .

Après un pèlerinage à la Mecque, il revient auréolé du titre de El-Hadj, mais surtout porteur d’une mission spirituelle beaucou plus grande.

Le Khalife désigné par Cheikh ELhadji Oumar Tall

Par l’intermédiaire de son oncle Alfa Hima Yéro Wélé, il est désigné Khalife de la Tarîqa Tijaniyya au Sénégal par Cheikh Oumar Al Foutiyou Tall. Il hérite alors d’une lourde responsabilité : reconstruire la confrérie dans un contexte colonial, de conflits et de transformation sociale. Dans son travail d’initiation au tidjanisme auprès des Sénégalais, Il fut beaucoup aidé par les groupements omariens, eux mêmes tidjanes. Seydi El-Hadj Malick Sy fit une propagande discrète, surtout centrée sur la diffusion de la confrérie dans les centres urbains, avec la construction de mosquées et de daaras « écoles d’enseignement islamique » , au Waalo, Cayor, Fouta, Djolof, Sine-Saloum.

Il opte pour une approche différente de celle de ses prédécesseurs : non par les armes, mais par l’éducation, la spiritualité et l’organisation.

Ndiarndé : La phase de préparation

Avant de s’installer à Tivaouane, il séjourne à Ndiarndé, près de Louga. Selon le professeur Rawane Mbaye, ce fut un moment crucial : Seydi Hadj Malick y forme ses premiers Mouqaddams (représentants de la Tarîqa) dans un esprit d’unité et de discipline, qu’on peut citer: Seydi Ahmed Sy fils aine d’El hadji Malick Sy, serigne Babacar Sy , serigne Alioune Gueye, serigne Seybatou Fall, El Hadji Rawande NGom et tant d’autres.

Ce « séminaire » discret mais fondamental permet de poser les bases d’une transmission organisée de la voie tijane. Il y enseigne non seulement le wird, mais aussi la posture morale et spirituelle du mouqaddam, son rôle d’exemple et de guide dans la société.

Tivaouane : Le cœur de son œuvre

Seydi El-Hadj Malick Sy séjourne en Mauritanie, s’installe à Saint-Louis en 1884, puis à Louga et Pire avant de s’établir à Tivaouane en 1902 à la suite d’une demande, dit-on, du grand notable Djibril Guèye qui l’invita à y rester. il s’installe à Tivaouane, village modeste qui deviendra le centre de rayonnement de la Tijaniyya. Là, il bâtit :

des daaras solides pour la formation des enfants et des talibés,

une célébration structurée du Maouloud (Gamou, célébration de la naissance du prophète Mohamed sws),

et surtout une zawiya centrale, lieu de prière, d’enseignement et de rassemblement spirituel.

Mais plus encore, il y forme des figures majeures de la Tarîqa, qui deviendront des piliers de la Tijaniyya au Sénégal et au-delà : El Hadj Seydou Nourou Tall, Cheikh Aliou Ba, Serigne Aliou Gueye, et tant d’autres, dont la liste est longue. Ces Mouqaddams sont le fruit d’une pédagogie exigeante, mêlant science, spiritualité et exemplarité.

Son action dépasse aussi Tivaouane. Il fonde des zawiyas à Dakar et a Saint-Louis, afin de permettre aux musulmans des grandes villes d’avoir accès à la formation soufie et à la pratique régulière du dhikr.

Une œuvre intellectuelle riche

Seydi El-Hadj Malick Sy laisse derrière lui une œuvre écrite remarquable, à la fois claire, rigoureuse et accessible. Parmi ses livres, on peut citer :

Khilassou zahab

Kifâyat ar-Râghibîn

Ifhâm al-Munkirû Djâni

Taysîr

Ses écrits visent à défendre la voie de la Tijaniyya, instruire les disciples, mais surtout rappeler la centralité de Dieu dans la vie du croyant.

Une école vivante, un héritage durable

Autour de lui, des hommes sincères et dévoués deviennent ses disciples. Parmi eux, Serigne Hady Touré, qui transmettra sa pensée dans ses poèmes avec passion et fidélité. Seydi El-Hadj Malick Sy a su créer une véritable école, centrée sur la droiture, le savoir et la spiritualité pratique.

Le rappel à Dieu

Le 27 juin 1922, il retourne à son Seigneur. Mais sa lumière ne s’est jamais éteinte. Son œuvre continue de vivre à travers :

les daaras de Tivaouane et d’ailleurs,

les zawiyas qu’il a fondées,

les gamous annuels,

et les innombrables talibés qu’il a inspirés.

Conclusion

Seydi El-Hadj Malick Sy reste une lumière vivante de l’islam au Sénégal et au-delà. Par son érudition, sa piété et son organisation, il a bâti une école spirituelle durable, enracinée dans le soufisme vivant et fidèle à la voie de la Tijaniyya.

Son héritage ne se limite pas à la sphère religieuse : il continue d’inspirer des chercheurs, des universitaires et des penseurs à travers le monde, qui étudient son œuvre avec respect et admiration. Par ses écrits, ses disciples et l’influence de Tivaouane, il a marqué l’histoire religieuse, intellectuelle et culturelle de l’Afrique de l’Ouest et du monde musulman contemporain.

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